Les raisons de la peine

Ahmed Farrah Publié dans Le Quotidien d'Oran le 08 - 12 - 2016

Où est passée l'Algérie qui forçait le respect de tous ceux qui y venaient faire du pèlerinage révolutionnaire et toucher de près ses hommes, ses héros ? Certes, ce temps est révolu, et la plupart de ses acteurs ne sont plus là pour en parler, mais faut-il quand même rappeler qu'à cette époque le patriotisme y était une religion et Alger La Mecque des rebelles contre l'ordre injuste imposé aux damnés de la terre.
Dans les années 1970, le pays recevait le Monde et ses dirigeants dans les règles de l'hospitalité et des convenances, pour changer le sort des peuples ligotés dans des siècles de soumission et d'asservissement. Des sommets de chefs d'Etats arabes, africains, des pays non-alignés et de l'OPEP furent incontestablement des réussites politiques et diplomatiques gravées dans le marbre de l'histoire grâce au dévouement, à la discipline, aux compétences et à la volonté de bien faire de tous ceux qui avaient l'Algérie dans le cœur et dans le sang.
Quoi qu'on dise sur cette période, au moins elle aura donné de la noblesse au pays et de la fierté au peuple. Aujourd'hui, l'individualisme et l'égocentrisme sont sur le point de mettre à bas tout l'héritage du combat pour la dignité et la liberté. Le culte de la richesse affaiblit l'Etat au lieu de le rendre fort, prospère et puissant. Les puissances de l'argent montent, les groupes d'intérêt et les lobbies entrent peu à peu dans la sphère de la politique et deviennent incontournables et influents. Leur appétence est grande et la boulimie fait perdre la tête à ceux qui ne se soucient pas de leur ligne et de leur bedaine. L'important est de monter d'un cran sur le piédestal pour se hisser au rang de ceux qui se trouvent au somment de la pyramide alimentaire. S'arrêtent-ils là ? Pas si sûr ! Le plafond de verre ne les effraye pas, même si l'ambition peut nous paraître démesurée et la chaussure trop grande à leur pied. Ils savent que c'est l'ère du «tout est possible» et que l'argent roi peut leur ouvrir la porte de l'ascenseur les hissant vers les cimes du pouvoir dont ils rêvent.
Pourquoi pas ? En tout cas, on en a vu sous d'autres cieux, en Afrique à Bokassastan, d'autres, diamantaires ceux-là, dont l'immaturité cérébrale était ridicule, l'infirmité culturelle était manifeste et l'attitude hautaine ; toutefois, ils se sont auto-couronnés empereurs éphémères dans un faux empire sous l'œil amusé d'un monde qui laissait faire pour les défaire ensuite. Ainsi, la peine suit toujours le péché.