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Publié dans Le Quotidien d'Oran le 24 - 11 - 2016


Depuis le 8 novembre dernier, l'Inde est entrée en guerre contre le marché informel, la corruption et l'argent noir et le faux qui sabordent l'économie de ce pays peuplé de 1,3 milliard d'Indiens. Du jour au lendemain, le gouvernement a retiré de la circulation près de 80% de sa monnaie constituée essentiellement de billets de banque de grosses coupures de 500 et 1000 roupies. Cette mesure surprenante, prise dans le secret total, a produit un choc effroyable dans un pays où tout se vend et s'achète cash. La démonétisation de ces deux billets, les rend définitivement inutilisables dans les transactions commerciales sauf dans les guichets des banques pour les échanger contre de nouveaux, à hauteur de 4.000 roupies (55 euros), le reste doit être déposé sur un compte en banque. Au-delà de 3.400 euros déposés, il faudra prouver au fisc l'origine des fonds. Ainsi, il est attendu de cette lourde opération qui ébranle les habitudes dans un pays où paradoxalement près de 450 md d'euros échappent annuellement au contrôle du fisc et où la majorité de la population vit dans la précarité et la pauvreté imposée par un système de castes ancestral.
Sans volonté et sans courage politique, une telle démarche, avec tous les risques qui pourraient en résulter pour assainir l'économie moribonde d'un pays, qui ne profite qu'aux tricheurs, serait impossible. La corruption n'est mesurable que par les fortunes apparentes et spontanément acquises et le train de vie ostentatoire et douteux de ces nouveaux nababs et golden-boys qui juste hier vivaient dans les bas-fonds de la société et qui, aujourd'hui, possèdent des villas cossues, des appartements haussmanniens, des comptes à l'étranger, des jets privés, etc. Les toucher n'est pas sans risque dans un univers où les gens se tiennent par la barbichette et où la compromission est tentaculaire. Pour ces raisons la facture de l'évasion fiscale et de la mauvaise gestion des deniers publics est presque toujours payée par ceux qui n'en sont pas responsables, c'est-à-dire les petites gens déjà chétives à qui on demande de serrer la ceinture et se partager la misère.
Les responsables indiens ont décidé de faire rentrer dans les banques l'argent qui circule hors du contrôle de l'Etat en procédant d'une façon radicale pour marquer les esprits et rappeler que l'Etat est fort et que nul n'est au-dessus de la loi.
Ici, ni les restrictions des transactions marchandes en cash, au-delà d'un montant de 500 mille dinars, ni les facilités fiscales pour déposer les milliards de dinars en circulation sans aucun justificatif n'ont pu être efficaces pour injecter cet argent dans l'économie réelle. Reste la manière forte. Mais est-ce possible dans un pays figé dans l'automne d'oser l'été indien ?

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